Maîtriser l'art de la tarification : stratégies gagnantes et pièges à éviter
Cet article issu de notre expérience met en lumière les opportunités et les risques auxquels sont confrontées les entreprises et notamment la tarification inappropriée liée à une mauvaise interprétation des méthodes de notation.
Dans l'arène compétitive des marchés publics, la stratégie de tarification est un art subtil, modelé par
quatre méthodes de notation distinctes :
La méthode classique,
La notation linéaire,
La moyenne des offres,
La méthode des carrés Suisses.
Chaque méthode influence la manière dont les entreprises avisées ajustent leurs prix pour se
positionner avantageusement tout en préservant leur marge. Cet article issu de notre expérience
met en lumière les opportunités et les risques auxquels sont confrontées les entreprises et
notamment la tarification inappropriée liée à une mauvaise interprétation des méthodes de notation.
Par ailleurs, dans les mois qui viennent, la pression budgétaire des collectivités va augmenter
fortement. Elles seront donc obligées de trouver des économies importantes afin de limiter la
pression fiscale et les impôts (sur les entreprises et les habitants)...
Les risques d'une mauvaise compréhension des méthodes de notation du prix
Une interprétation erronée de la méthode de notation peut conduire à des offres mal calibrées,
réduisant les chances de succès. Par exemple, une entreprise qui ne saisit pas la subtilité d'une
méthode linéaire peut se retrouver avec un score de prix défavorable.
Par ailleurs, une offre trop basse peut mener à des pertes financières sur le projet, tandis qu'une
offre trop élevée peut éliminer l'entreprise de la compétition. Les entreprises doivent trouver un
équilibre pour rester compétitives tout en garantissant leur rentabilité.
Les 4 méthodes d’évaluation du critère prix
Cas n°1 : Méthode classique : le moins disant
La méthode classique, avec son accent sur le prix le plus bas, est un jeu de funambule où la qualité
risque d'être sacrifiée sur l'autel du coût. Cette approche, bien que simple et directe, met les
entreprises face à un dilemme : comment maintenir la qualité tout en proposant le prix le plus bas
possible ?
Cas n°2 : Méthode de la notation linéaire
La notation linéaire, en revanche, offre un terrain plus nuancé. En attribuant des points sur une
échelle progressive entre le prix le plus bas et un plafond prédéfini, elle permet une plus grande
flexibilité. Cette méthode encourage les entreprises à trouver un équilibre entre un prix compétitif
et la viabilité financière de leur offre, en tenant compte de la qualité et de la valeur ajoutée.
Cas n°3 : Méthode de la moyenne
Quant à la méthode de la moyenne des offres, elle se présente comme un équilibre entre les
extrêmes, promouvant une tarification qui reflète la moyenne du marché. Cette approche vise à
créer un terrain de jeu équitable, mais peut parfois désavantager les offres extrêmement
compétitives ou innovantes en termes de prix.
Cas n°4 : Méthode des carrés Suisses
La méthode des carrés est une approche spécifique utilisée pour évaluer le critère prix de manière
plus précise et équitable. C’est une méthode couramment utilisée en Suisse. La formule est la
suivante :
La méthode des carrés pénalise de manière plus forte les offres éloignées du prix le plus bas.
Contrairement à une approche linéaire, où la diminution des points est progressive, cette méthode
rend les écarts significatifs plus visibles.
Exemples numériques appliqués
Pour illustrer ces trois méthodes de notation dans les marchés publics à travers des exemples
numériques concrets, nous allons examiner trois scénarios dans lesquels cinq entreprises soumettent
des offres pour un marché. Le prix joue un rôle clé dans chaque méthode de notation, mais il est
calculé différemment selon le système employé. Sortez vos calculettes !
Cas n°1 : Méthode classique : le prix le plus bas l'emporte
Offres soumises :
Entreprise A : 500 000 €
Entreprise B : 470 000 €
Entreprise C : 450 000 €
Entreprise D : 480 000 €
Entreprise E : 510 000 €
Méthode : L'entreprise qui propose le prix le plus bas reçoit la meilleure note,
c'est-à-dire un score de 100, et les autres offres sont notées en fonction de leur écart par rapport
à ce prix.
Résultat : L'entreprise C, avec l'offre de 450 000 €, obtient 100 points. Les autres
entreprises reçoivent une note proportionnelle à leur prix par rapport à cette offre la plus basse.
Entreprise C :
Entreprise B :
Entreprise D :
Entreprise A :
Entreprise E :
La meilleure note est attribuée à L'entreprise C, la moins chère.
Interprétation : La méthode classique privilégie clairement
le prix le plus bas, mais les entreprises doivent réduire leurs marges pour rester compétitives,
ce qui pourrait impacter la qualité.
Cas n°2 : Méthode de la notation linéaire : échelle progressive entre le prix le plus bas et un plafond
Offres soumises :
Entreprise A : 500 000 €
Entreprise B : 470 000 €
Entreprise C : 450 000 €
Entreprise D : 480 000 €
Entreprise E : 510 000 €
Méthode : Dans la notation linéaire, on attribue des points sur une échelle
progressive,généralement avec un score de 100 points pour le prix le plus bas, et un score de
0 pour le prix le plus élevé ou un seuil prédéfini.
Plafond fixé : 510 000 €.
Résultat : L'entreprise C, avec 450 000 €, reçoit 100 points. L'entreprise E,
avec 510 000 €, reçoit 0 point. Les autres entreprises reçoivent des points proportionnels en
fonction de leur prix.
Entreprise C :
Entreprise B :
Entreprise D :
Entreprise D :
Entreprise E : 0 point (prix le plus élevé)
Interprétation : La notation linéaire permet une flexibilité. Ici,
l'entreprise B, même si elle n'a pas le prix le plus bas, reçoit une note acceptable. Cela incite les
entreprises à trouver un équilibre entre prix et qualité, sans nécessairement viser l'extrême du prix
le plus bas.
Cas n°3 : Méthode de la moyenne des offres : tarification moyenne du marché
Offres soumises :
Entreprise A : 500 000 €
Entreprise B : 470 000 €
Entreprise C : 450 000 €
Entreprise D : 480 000 €
Entreprise E : 510 000 €
Méthode : Ici, la note est attribuée en fonction de la proximité de l’offre par
rapport à la moyenne de toutes les offres. L’offre la plus proche de la moyenne reçoit le score
maximal (100 points), et les autres sont notées en fonction de leur écart avec cette moyenne.
Moyenne des offres :
Résultat : L'entreprise D, avec 480 000 €, est la plus proche de la moyenne et
obtient 100 points. Les autres entreprises reçoivent des notes proportionnelles à leur distance
par rapport à la moyenne.
Entreprise D (480 000€) :
Entreprise C (470 000€) :
Entreprise A (500 000€) :
Entreprise E (510 000€) :
Entreprise E (450 000€) :
Interprétation : La méthode de la moyenne des offres avantage les
entreprises dont les propositions sont proches de la moyenne du marché. Elle favorise donc une certaine
standardisation des prix. Cependant, les offres très compétitives, comme celle de l’entreprise C, sont
désavantagées, tandis que les entreprises qui adoptent une stratégie de milieu de gamme, comme
l'entreprise D, sont récompensées.
Cas n°4 : La méthode des carrés Suisses
Offres soumises :
Entreprise A : 500 000 €
Entreprise B : 470 000 €
Entreprise C : 450 000 €
Entreprise D : 480 000 €
Entreprise E : 510 000 €
Méthode : Ici, la note est attribuée en fonction de la proximité de l’offre par rapport
à la moyenne de toutes les offres. L’offre la plus proche de la moyenne reçoit le score maximal (100 points),
et les autres sont notées en fonction de leur écart avec cette moyenne.
La plus basse des offres : Ici, l’offre la plus basse est d’un montant de 450 000€.
Résultat : L'entreprise C, avec 450 000 €, est la moins chère et obtient 100 points. Les
autres entreprises reçoivent des notes proportionnelles au carré de leur distance par rapport à l’offre la
plus basse.
Entreprise C (450 000€) : 100 points (offre la moins chère)
Entreprise B (470 000€) : 92 points
Entreprise D (500 000€) : 88 points
Entreprise A (510 000€) : 81 points
Entreprise E (450 000€) : 78 points
Interprétation : La méthode des carrés suisses vise à évaluer les offres financières
en fonction de leur proximité avec la moyenne des propositions soumises, tout en favorisant une
pondération progressive des écarts grâce à un calcul basé sur les carrés des différences.
Dans cet exemple, l’entreprise C, avec une offre de 450 000 €, est la moins chère et obtient la
note maximale de 100 points. Les autres entreprises se voient attribuer des notes proportionnelles
à l'écart de leurs offres par rapport à cette référence, calculées selon le carré de la distance.
Cette méthode valorise la compétitivité tout en pénalisant de manière graduelle les offres éloignées
de la moyenne.
Résultats comparés
Laissons les calculs pour une visualisation graphique des résultats :
Vous noterez que l’entreprise, c’est la gagnante dans une attribution sur les méthode classique et
linéaire mais devient la grande perdante dans la méthode de la moyenne des offres. Pire encore : elle
devient dernière du classement. Sacrée performance !
Conclusion
Chacune de ces méthodes influence directement la stratégie tarifaire des entreprises dans les
marchés publics :
Méthode classique : incite à soumettre le prix le plus bas possible, mais
risque d’impacter la qualité.
Méthode linéaire : offre une flexibilité en notant les offres selon une
échelle progressive, encourageant un équilibre entre prix et qualité.
Méthode de la moyenne des offres : favorise les prix moyens, mais peut
pénaliser les offres très compétitives ou innovantes en termes de prix.
Ces exemples numériques montrent comment chaque méthode peut transformer la manière dont les
entreprises ajustent leurs prix pour maximiser leurs chances de succès tout en préservant leur
rentabilité.
Les entreprises doivent donc se familiariser avec les différentes méthodes de notation et réaliser des
analyses de marché approfondies. Il est également conseillé de consulter des experts pour éviter les
pièges courants et pour élaborer des stratégies de tarification efficaces.
A propos de l'auteur
Grégory PACAUD
Expert en marchés publics : 20 ans chez Veolia, plus de 5 000 appels d’offres pilotés, c’est aussi 45000 cafés avalés, 18 claviers d’ordinateurs, 137 crayons Bics, mais toujours la même énergie et la même envie de gagner tous les appels d’offres.
Grégory Pacaud a accumulé un savoir-faire et une technicité
précieuse dans les réponses aux appels d’offres. En 2017, après
avoir passé 20 ans chez Véolia Environnement, dont une dizaine
d’années à la tête du bureau d’études Bretagne est parti monter
sa première entreprise : FactStory dont l’activité était d’aider
les PME à se développer proprement et rapidement en gagnant beaucoup
de marchés publics.