VICTORYUS - Clause d’insertion : levier stratégique ou contrainte dans les marchés publics ?

07/07/2025

Clause d’insertion : levier stratégique ou contrainte dans les marchés publics ?

La clause d’insertion, encore trop souvent perçue comme un passage obligé purement administratif, est en réalité un puissant levier stratégique.

La clause d’insertion, encore trop souvent perçue comme un passage obligé purement administratif, est en réalité un puissant levier stratégique. Bien maîtrisée, elle peut renforcer la qualité de votre réponse, crédibiliser votre positionnement et créer de la valeur au niveau local.

Qu’est-ce qu’une clause d’insertion ?

La clause d’insertion est une disposition contractuelle inscrite dans certains marchés publics. Elle impose ou encourage le titulaire du marché à réserver une part des heures de travail à des publics éloignés de l’emploi. Ces publics incluent notamment :

  • Les demandeurs d’emploi de longue durée
  • Les jeunes sans qualification
  • Les bénéficiaires de minima sociaux
  • Les travailleurs handicapés
  • Les personnes accompagnées par des structures d’insertion ou des GEIQ (Groupement d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification).

Pourquoi cette clause est-elle de plus en plus utilisée ?

La clause d’insertion s’inscrit dans une logique de commande publique responsable. Elle permet à l’acheteur d’utiliser son budget comme un outil d’impact social, tout en répondant à ses besoins opérationnels. Trois objectifs sont généralement recherchés :

  • Favoriser l’emploi local et lutter contre l’exclusion
  • Développer des compétences dans les territoires
  • Impliquer les entreprises dans une logique partenariale avec les acteurs sociaux

Ce que dit la réglementation en 2025

Jusqu’ici incitative, l’insertion devient progressivement une exigence généralisée. Le décret n°2024-1234 du 15 mars 2025 (à paraître) prévoit que les acheteurs publics devront intégrer une clause sociale dans tous les marchés dépassant les seuils européens, sauf cas dûment justifiés. Cette évolution s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale pour l’inclusion et l’économie sociale et solidaire.

📌 À noter : Les acheteurs sont également accompagnés par des facilitateurs de clauses sociales pour assurer leur mise en œuvre opérationnelle.

Les erreurs à éviter

  • Penser que l’insertion est "optionnelle" : si elle est présente dans le règlement de consultation, elle engage.
  • Se contenter d’un engagement flou ou générique : les réponses doivent être concrètes, chiffrées et localisées.
  • Oublier de démontrer la faisabilité de l’action : les acheteurs veulent s’assurer que l’engagement ne restera pas théorique.

Les bonnes pratiques à adopter

1. Faites un diagnostic de vos engagements sociaux existants

Avant de chercher à monter un partenariat ou recruter, commencez par regarder ce que vous faites déjà :

  • Avez-vous un ou des salariés en situation de handicap ? (RQTH)
  • Collaborez-vous avec un ESAT (Établissement ou Service d’Aide par le Travail) ou une entreprise adaptée ?
  • Avez-vous embauché récemment via la mission locale, France Travail ou un GEIQ ?
  • Avez-vous déjà eu recours à un alternant ou stagiaire issu d’un parcours d’insertion ou d’un quartier prioritaire ?
  • Avez-vous internalisé un ancien intérimaire en difficulté ?

👉 Tout cela peut compter, à condition de le formaliser (attestations, certificats de travail, feuilles d’heures, etc.) et de l’intégrer à vos réponses dans les marchés.

2. Capitalisez sur votre taux d’emploi de personnes en situation de handicap

C’est l’un des critères les plus tangibles et souvent oubliés. Si vous avez des salariés déclarés avec une Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH), cela peut être pris en compte dans le calcul des heures d’insertion.

👉 À faire:

  • Récupérez les attestations AGEFIPH ou URSSAF si vous déclarez au moins 6 % de RQTH,
  • Mentionnez-les dans vos réponses aux appels d’offres (dans la mémoire technique ou les documents RSE),
  • Valorisez également vos efforts d’aménagement de poste ou de maintien en emploi.

3. Recensez vos achats responsables existants

Si vous faites appel à des structures comme :

  • une entreprise adaptée (EA),
  • un établissement et service d’aide par le travail (ESAT),
  • une entreprise d’insertion (EI),
  • ou même un sous-traitant employant des profils en insertion... vous êtes déjà dans une logique d’économie inclusive.

👉 À faire:

  • Demandez un relevé d’heures ou de volume d’affaires aux structures concernées,
  • Ajoutez ces éléments dans votre mémoire de réponse ou dans votre clause d’exécution.

4. Identifier ce que vous pouvez externaliser vers une structure d’insertion

Toutes les entreprises n’ont pas la capacité d’embaucher une personne en insertion directement. Et ce n’est pas obligatoire ! Exemples concrets :

  • Une entreprise de peinture a confié le préparation des chantiers (protection, nettoyage, petits transports) à une association intermédiaire,
  • Une société de services numériques a externalisé la numérisation de documents à un atelier chantier d’insertion,
  • Une entreprise de nettoyage a passé un marché de sous-traitance partiel avec une entreprise d’insertion pour une partie des logements à traiter.

👉 À faire: dresser la liste des tâches périphériques ou non stratégiques que vous pouvez déléguer. Puis contacter les structures locales (EI, ACI, AI, ETTI, EA, etc.) pour étudier leur faisabilité.

5. Penser insertion = recrutement

La clause d’insertion peut aussi être l’occasion de tester un futur salarié. C’est un canal de pré-recrutement encadré et accompagné. Exemple: Une entreprise de second œuvre a embauché en CDD un jeune passé par la mission locale, avec un tutorat interne de 3 mois, avant transformation en CDI. Ces heures ont été comptabilisées dans la clause.

👉 À faire: contacter un facilitateur ou votre agence France Travail pour proposer un poste à pourvoir. Il vous aidera à identifier des profils, vous bénéficierez souvent d’aides (tutorat, formation, contrats aidés).

6. Formaliser un partenariat avec une structure d’insertion

Dans vos réponses aux marchés publics, un engagement clair et formalisé avec une structure d’insertion peut vous faire marquer des points, notamment si un critère social est présent. Exemple: Une entreprise de restauration collective a intégré une lettre d’engagement d’un chantier d’insertion local, détaillant les modalités, les tâches confiées, le nombre d’heures et le calendrier.

👉 À faire: avant même de répondre, anticiper et obtenir des lettres d’intention ou conventions. Cela rassure l’acheteur sur votre capacité à tenir vos engagements.

7. Sécuriser la mise en œuvre avec un facilitateur

La plupart des territoires disposent d’un réseau de facilitateurs, qui sont des experts des clauses sociales. Ils peuvent:

  • vous proposer des structures adaptées à vos besoins
  • vous aider à calibrer votre clause
  • assurer le suivi administratif avec l’acheteur

👉 À faire: repérer le facilitateur local (souvent rattaché à la Maison de l’emploi, à la communauté d’agglomération ou à la DIRECCTE) et l’impliquer dès la consultation.

8. Capitaliser sur la clause dans votre communication RSE

Une clause bien menée est aussi un outil de communication RSE, auprès de vos partenaires, de vos équipes et des donneurs d’ordre. Exemple : Une entreprise d'impression a inclus les heures réalisées dans son rapport RSE annuel, avec indicateurs et témoignages.

👉 À faire: documenter vos actions (photos, chiffres, retours d’expérience), les valoriser dans vos plaquettes ou soutenances, et montrer que l’insertion s’inscrit dans une démarche globale.

En résumé : une clause sociale réussie, c’est...

  • une tâche identifiée à externaliser ou un poste à tester
  • un partenaire d’insertion identifié et engagé
  • un montage clair, réaliste et contractualisé
  • un suivi actif par l’équipe et/ou un facilitateur
  • une valorisation dans votre stratégie RSE
A propos de l'auteur
VICTORYUS - Grégory PACAUD

Grégory PACAUD

VICTORYUS - LinkedIn Grégory PACAUD

Expert en marchés publics : 20 ans chez Veolia, plus de 5 000 appels d’offres pilotés, c’est aussi 45000 cafés avalés, 18 claviers d’ordinateurs, 137 crayons Bics, mais toujours la même énergie et la même envie de gagner tous les appels d’offres.

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A propos de Victoryus

Grégory Pacaud a accumulé un savoir-faire et une technicité précieuse dans les réponses aux appels d’offres. En 2017, après avoir passé 20 ans chez Véolia Environnement, dont une dizaine d’années à la tête du bureau d’études Bretagne est parti monter sa première entreprise : FactStory dont l’activité était d’aider les PME à se développer proprement et rapidement en gagnant beaucoup de marchés publics.

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